Au cours des quinze dernières années plusieurs travaux menés majoritairement sur des sites relativement peu perturbés ont montré un effet persistant de la structure du paysage passée (composition et configuration) sur la biodiversité végétale actuelle. Notre étude vise à préciser si cet effet persiste également dans des milieux intensément perturbés tels que les habitats de l'interface route-champ cultivé (soit les compartiments : accotement, talus et bordure intérieure du champ). Pour cela, nous utilisons des relevés de la flore vasculaire réalisés sur 190 bords de route du département d'Indre-et-Loire, qui ont permis de mesurer la composition taxonomique, la richesse spécifique et le pourcentage d'espèces pérennes dans chacun des trois compartiments. Ces mesures de la végétation ont été mises en relation, par des analyses statistiques, avec des métriques paysagères mesurées dans une zone tampon de 1000 m autour des points de relevé à deux dates (2014 et le XIXe siècle), à partir des cartes d'occupation du sol issues de plusieurs sources (IGN, RPG, cadastre napoléonien). Il s'agit de la proportion de prairies et de bois et de leur connectivité respective, la diversité d'habitats, la densité de bordures.
Nos résultats montrent un effet plus important du paysage du XIXe siècle sur la composition taxonomique des trois compartiments, la richesse spécifique des bermes et la proportion d'espèces pérennes des talus. Ceci suggère une réponse décalée dans le temps des communautés végétales de l'interface route-champ cultivé face aux changements paysagers, qui peut être expliquée par la forte diversité d'habitats caractérisant le paysage passé.